Eduquer, c'est d'abord rassurer |
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Dès la naissance, le bébé réagit à son entourage. La période pendant laquelle ses besoins sont si impérieux qu'il est difficile de le nourrir autrement qu'à la demande ne dépasse guère l'âge de deux mois. Ensuite, il est bon d'adopter une démarche plus directive, de « reprendre le pouvoir » (par exemple anticiper, retarder un peu les repas) pour adapter et stabiliser le schéma spontané qui émerge et aboutir à un horaire plus régulier des repas, mais également du sommeil. Le besoin de régularité aide à comprendre pourquoi des enfants plus âgés sont si attachés aux rituels du coucher. Ils ne se lassent pas d'entendre la même histoire et protestent même - en corrigeant le raconteur - s'il s'écarte de la version habituelle. Car d'un autre côté. c'est seulement en défiant la règle, en jouant avec elle, que l'enfant apprécie sa réalité, son importance aux yeux des parents et prend la mesure de leur force, en tant que personnes capables d'imposer leur volonté. Cette nouvelle étape débouche sur plusieurs acquis : (1) La notion que la vie sociale implique des normes, des lois qui offrent des repères. s'imposent à tous et protègent chacun. On a comparé les limites à un mur qui empêche de passer... mais auquel on peut s'appuyer, comme un cours d'eau canalisé par ses berges. Et on constate que ce besoin est encore plus marqué chez les enfants de haut potentiel, à qui il faut vraiment des parents « à la hauteur », à leur hauteur. (2) D'autre part l'émergence du conflit, combinée à la découverte du
« non » permet de comparer sa propre détermination à Naturellement peu d'adultes sont capables de garder leur calme en toutes circonstances devant un enfant insupportable. Et paradoxalement une maîtrise trop parfaite comporte même un risque : celui de projeter l'image d'une personne incapable d'erreurs, d'émotions, dénuée de sentiments, d'un parent si parfait, si respectueux du manuel qu'il en vient à se comporter comme une machine, un robot, auquel l'enfant est incapable de s'identifier. Si les dérapages d'un adulte excédé ne sont pas toujours évitables, ils ont donc eux aussi un côté rassurant, voire nécessaire. Ce qui n'empêche pas - au contraire - de les admettre, ni de les regretter. Cela dit, quand des parents expliquent que l'enfant
les a fait sortir de leurs gonds, l'image reflète bien la réalité. Ouverte ou
fermée, Céder dans ces conditions. c'est ne pas
comprendre la source d'attitudes, parfois de plus en plus délinquantes ou
provocatrices. qui ont pour objectif caché de révéler, de retrouver la limite et d'acculer
les parents à montrer leur force. En capitulant, ils risquent
d'adresser un message porteur d'angoisse, celui d'un monde
flou, déstructuré, imprévisible, et d'adultes incapables de résister, donc
trop faibles pour fournir une protection suffisante. Et ceci peut déboucher sur
une escalade de comportements de moins en moins supportables. L'inaptitude à différer le plaisir est un élément des comportements immatures, régressifs ou déviants (grignotage. alcoolisme, dépendances, paresse, abus de drogues, promiscuité sexuelle, impulsivité, violence ...). Ces défauts sont universels, mais ont sans doute été favorisés par le rejet simpliste de toute autorité ou règle contraignante (« il est interdit d'interdire »), par des soixante-huitards insurgés à l'époque contre une société rigide, dogmatique et étouffante. Aujourd'hui, on voit en tout cas de plus en plus de jeunes élevés sans tabous, sans inhibitions, mais qui n'ont pas appris à supporter le "non". * * *
Les conséquences sont parfois dramatiques. Car sans encadrement, sans structure éducative, la personnalité se forme difficilement. Ce n'est sans doute pas par hasard qu'on rencontre aujourd'hui tant d'individus anxieux, indifférents ou déboussolés, sans repères ou convictions, marginaux ou mal socialisés, incapables de rigueur, d'engagements ou d'efforts soutenus, privés d'attaches durables, avec parfois d'immenses difficultés à s'insérer dans un entourage familial, scolaire, social ou professionnel. Cette misère psychologique, morale, affective, sociale engendre souffrance et frustrations. Par là elle est source d'agressivité envers soi-même et les autres. Ce qui aide à comprendre les galères vécues par nombre de jeunes désorientés. Leur fragilité, leur insécurité les exposent - plus que d'autres - aux pièges et aux blessures de ces contestations creuses, de ces dissidences illusoires que sont la délinquance, les drogues, voire le fanatisme des sectes, défis au monde réel, pauvres joies sur fond de malheur, fausses routes d'enfants perdus dans des voies sans issue. * * * ------------------------------------------------------------------------------------------ |
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